Vie collective dans les Oflags ...
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vie collective dans un oflag
La cuisine et quelques travaux domestiques, lessives ou raccommodages sommaires, ne remplissaient pas les journées. La vie d'un oflag était une vie oisive, où le grand problème était de meubler ces journées vides dont le nombre s'allongeait désespérément. C'était une nécessité primordiale pour tous, du point de vue individuel comme du point de vue collectif, si l'on voulait éviter les, pires désordres, physiques ou mentaux.
Tous ceux qui, à quelque titre que ce fût, se sentaient des responsabilités vis-à-vis de leurs camarades s'en rendirent rapidement compte ; dès les premières semaines de la captivité, et malgré le dénuement, s'organisa une vie collective qui fut, sans aucun doute, la principale originalité de cette société en vase clos.
Cette organisation fut d'ailleurs rendue, dans une large mesure, relaivement facile par la composition sociale des camps. Les oflags étaient, surtout au début, de dimensions inégales, mais la plupart groupaient plusieurs milliers d'officiers qui appartenaient à des milieux divers, avaient des professions, des connaissances, une culture différentes ; ils possédaient, en mettant en commun tout cet acquis, des ressources aussi riches que variées.
distractions dans les oflags
Voulait-on se maintenir en bonne condition physique ? Il se trouva immédiatement des professeurs qui organisèrent, à tous les niveaux souhaitables, des cours réguliers pour lesquels, au moins, il n'était guère besoin de matériel. Plus tard, lorsque l'administration allemande se montra compréhensive, des terrains de sport furent aménagés, des équipes se formèrent, disputèrent des matches qui fournissaient un spectacle à leurs camarades. Ce fut facile pour ie basket-ball ; moins pour le football, qui exigeait plus de place. On réussit cependant à aménager de véritables stades, parfois même des courts de tennis. Des sports plus fermés, la boxe, l'escrime, le jiu-jitsu, avaient aussi leurs amateurs.
Rapidement aussi s'organisa la vie intellectuelle. Dans ce domaine non plus, les ressources ne manquaient pas. Au début, la bonne volonté suffisait pour organiser des causeries qui trompaient la faim. Des personnalités venaient parler de sujets qu'elles connaissaient : un officier d'active, du Japon, où il avait été attaché militaire ; un autre, du Sahara, où il avait vécu la vie de méhariste ; un savant du Muséum, de ses recherches de paléontologie ; un professeur de lettres, de Valéry ou de Giraudoux...
Plus tard s'organisèrent des cours suivis, de langues notamment, avec des professeurs d'allemand ou d'anglais, aussi bien que de russe, d'arabe ou de chinois, mais aussi de bien d'autres disciplines, histoire ou mathé­atiques, philosophie ou comptabilité... Les professeurs ne manquaient pas, soit de l'enseignement supérieur, soit du second degré. Le public non plus : dilettantes à la curiosité désintéressée, heureux de rafraîchir leurs connaissances scolaires ; jeunes, que la guerre avait surpris en cours d'études ; instituteurs, qui voyaient là l'occasion de se perfectionner et d'améliorer leur situation au retour. En effet, cette vie intellectuelle s'institutionnalisa bientôt. Dans chaque oflag fut créée officiellement une université, placée sous l'autorité d'un membre de l'enseignement supérieur, qui se vit donner le titre de recteur. Des cours furent organisés régulièrement, selon des programmes approuvés par le ministère de l'Éducation nationale ; on fit passer des examens, baccalauréat ou licence, avec des jurys régulièrement constitués, et leurs résultats furent homologués au retour. De la même manière, des inspecteurs primaires et des instituteurs mirent sur pied des cours et des sessions de certificat d'études pour hommes de troupe.
oflag camp allemand de prisonniers
Bien entendu, cette activité n'allait pas sans difficultés, car tout était problème. Comment trouver un coin paisible pour préparer une conférence, une salle pour faire un cours, alors que partout entassement et surpeuplement étaient la règle ?
Au début, même le papier était un luxe rare. Plus tard, les livres viendront, envoyés de France par divers comités. Mais les Allemands étaient méfiants. Tout matériel géographique était interdit, de peur qu'il ne servît à des évasions. Pour les livres, la censure avait dressé une longue liste d'interdictions, d'ailleurs parfaitement arbitraire. On y reconnaissait des ouvrages subversifs, des auteurs hostiles à l'Allemagne, israélites ou soupçonnés de l'être. Faire de l'histoire ou de la philosophie dans ces conditions n'était pas facile.
Un camp de deux mille officiers possédait cependant, à la fin de la captivité, une bibliothèque de travail de vingt mille volumes. Il y avait là de quoi satisfaire bien des curiosités. Il est vrai que, sauf exceptions peu nombreuses, les prisonniers étaient plus curieux que persévérants. Ils luttaient contre la monotonie de leur existence par la diversité de leurs activités, et ils recherchaient souvent des occupations nouvelles qui leur apportaient l'indispensable distraction. Il y avait là une sorte de nécessité de cette vie artificielle et anormale.
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